Un tract distribué à Nanterre en mars 2001… 

 

 

NANTERRE 2001

 

QUAND LES CAUCHEMARS DEVIENNENT REALITE...

 

 

Naguère symbole de la subversion, la fac de Nanterre est aujourd'hui à l'avant-garde du flicage et bientôt de la marchandisation.  Après qu’elle se soit progressivement endormie au cours des dernières années, les tenants du pouvoir ont décidé d'en finir définitivement et de faire le ménage pour supprimer les dernières traces de contestation et de non-droit.  Cette évolution réactionnaire n'est bien sûr pas spécifique à Nanterre (on la retrouve en France dans toutes les universités), elle n'y est que plus spectaculaire.

 

Cette véritable utopie du pouvoir relative au monde universitaire, seule la Gauche pouvait oser entreprendre de la réaliser.  Imaginez une fac où il n'y aurait plus jamais de grèves ni d'occupations ou de manifs… Une fac où les profs ne seraient plus interrompus dans leurs cours par on ne sait quels agitateurs... Une fac où tous les étudiants étrangers seraient blancs... Une fac où il faudrait payer 40 000 F pour s'inscrire et où il faudrait en plus travailler gratuitement dans une entreprise pour avoir son diplôme... Une fac où il n'y aurait plus de graffitis sur les murs et où seuls les syndicats représentés au conseil d'administration pourraient afficher des tracts (sur des panneaux sous verre et fermés à clef) et faire des tables de presse... Une fac où il y aurait un commissariat et où il faudrait montrer sa carte pour rentrer... Une fac où il y aurait une caméra dans chaque couloir... Une fac où il n'y aurait plus de cannabis et où on jouerait au foot le dimanche matin avec les flics du quartier... Pour le président de la fac, André Legrand, ce scénario n'est pas un mauvais épisode de X-Files, il y croit !

 

Legrand a commencé par supprimer la franchise universitaire (vieille de près de huit siècles !) à l'extérieur des bâtiments : désormais, les flics patrouillent impunément sur le campus (ce qui aurait déclenché une émeute il y a quelques années).  Ce délire sécuritaire s'intègre dans le Contrat Local de Sécurité (CLS) de la municipalité (PCF).  Déjà, un certain nombre de communes ont mis en place des CLS, incarnation concrète de l'idéologie sécuritaire de la Gauche.  Le CLS de Nanterre prévoit explicitement la mise en place de caméras à l'intérieur des bâtiments de la fac. La construction d'un nouveau PC de sécurité ainsi que les nouveaux vigiles et les maîtres-chiens (qui sont déjà là) en font partie.

 

Mais le projet de Legrand ne s'arrête pas là : il s'attaque carrément à l'architecture.  Objectif : cloisonner chaque bâtiment pour contrôler les allers et venus.  Concrètement, ça veut dire un mur entre chaque bâtiment avec un poste de vigiles à chaque entrée.  Avec un truc pareil, on comprend tout de suite qu'il devient impossible de faire une manif dans les couloirs; puisque justement il n'y a plus de couloirs ! On a déjà pu en faire une première expérience le 22 Mars dernier lorsque les étudiants rassemblés en cortège se sont vus empêcher de rentrer dans le bâtiment B, vengeance historique de l'Administration, 33 ans jour pour jour après la première occupation de la tour administrative.  Cette victoire de l'Administration n'a été possible que grâce à l'achèvement de la construction du premier mur, entre le bâtiment B et le bâtiment C. Désormais, les bâtiments A et B sont devenus totalement inaccessibles (sauf pour aller en cours !). Cette situation est particulièrement grave quand on sait que le bâtiment B est le coeur de la fac : c'est le hall principal, c'est là que s'y trouvent les deux plus grands amphis, et c'était aussi le principal lieu de convivialité avant que Legrand n'y fasse raser la cafétéria : seul endroit où il y avait du monde en permanence, c'était le lieu propice à toutes les agitations : il devait donc disparaître. La fresque soixante-huitarde qu'il y avait sur les murs a d'ailleurs été très symboliquement recouverte d'une épaisse couche de peinture bleue pour faire oublier Nanterrre la Rouge...

 

Dans ces conditions, il faut impérativement que la destruction du mur construit entre les bâtiments B et C deviennent une priorité. Ce mur est le principal obstacle au développement de la lutte.  L'Administration a été particulièrement intelligente sur ce coup là.  Si nous laissons ce mur, ils en construirons d'autres, et il deviendra impossible de lutter contre par la suite. 

 

Pour la suite, il est évident qu'on ne peut pas organiser la grève sans bloquer la fac et donc l'occuper. Même si on ne peut pas occuper tout de suite toute la fac, nous sommes suffisamment nombreux pour occuper un bâtiment.  Dans ce cas, on évitera l'erreur habituelle consistant à n'occuper qu'une seule salle du bâtiment.  Il est en effet impératif d'en bloquer toutes les entrées et d'empêcher tous les non-grévistes d'y accéder.  De plus, pour lutter contre le CLS, il faudra aussi s'attaquer à la mairie (la préfecture étant plus difficile d'accès).  Un autre axe de lutte pourrait être les milices de la RATP qui rackettent les passagers dans la gare.  Enfin, Nanterre étant la seule fac en France à se trouver à moins de 100m d'une prison, il serait intéressant d'élargir la lutte au soutien des prisonniers, d'autant plus que certains d'entre eux se sont faits arrêtés sur le campus. Une telle alliance pourrait en effet se révéler redoutable pour les autorités.

 

La lutte ayant déjà commencé dans d'autres facs (Metz, Toulouse, Montpellier, Nantes, Le Havre, Reims, Paris I, Jussieu, Villetaneuse, Aix-Marseille, Grenoble, Bordeaux, Brest...), il faut faire particulièrement attention à éviter les deux principales dérives habituelles de toute lutte : le corporatisme et la bureaucratisation.  Le corporatisme consisterait à exclure de la lutte tous ceux qui ne font pas partie de l'université.  La bureaucratisation consiste à élire des délégués sous le prétexte falacieux qu'ils n'auraient qu'une tâche technique et seraient révocables.  L'alternance des bureaucrates n'a malheureusement jamais empêcher la bureaucratie et il est bien évident que si les délégués n'avaient pas de décisions à prendre mais uniquement à faire appliquer des décisions déjà prises en Assemblée Générale, ils ne serviraient à rien.  En effet, l'application des décisions prises en AG relève de la responsabilité de chacun.

 

La bureaucratisation du mouvement est malheureusement probablement déjà à l'oeuvre puisqu'une coordination nationale étudiante a commencé à se mettre en place en demandant à être reçue par Jack Lang... Nous n'avons rien à demander à Jack Lang ! L'Etat est notre ennemi et nous n'avons rien à lui dire ! Qu'il crève ! Nous n'avons pas non plus besoin d'elire des délégués pour rencontrer, discuter, et nous coordonner avec celles et ceux qui sont déjà en lutte ! Il faut se souvenir de comment a fini la dernière coordination nationale étudiante en 1995 : comme son nom l’indique, elle était réservée aux étudiants.  Tous les jeunes qui n'étaient pas étudiants en étaient exclus d'office (pour les vieux, on en parle même pas).  Et évidemment cela a tourné à la baston entre les syndicalistes qui avaient pris le contrôle de la Coordination et les jeunes des cités venus dans les manifs.  C'est ainsi qu'on a pu voir les services d'ordre syndicaux empêcher «les mecs des cités» de prendre la parole au mégaphone, et bien sûr de rentrer dans l'amphi où se réunissait la Coordination Nationale Etudiante.  Il faudra donc empêcher la constitution de Services d'Ordre, quels qu'ils soient, qui ne font que criminaliser une partie des manifestants, en particulier les plus utiles d'entre eux : les casseurs, pillards, et autres émeutiers... Et on pourra s'interroger sur l'utilité de se rendre à certaines manifs traîne-savates...

 

 GREVE GENERALE !  OCCUPONS LA FAC !

 

  CHASSONS LES FLICS ET LES VIGILES !

 

 DETRUISONS LE MUR DE NANTERRE !

 

  RESISTONS A LA MARCHANDISATION !

 

 

 

Section enragée de Nanterre